Abstract:
Le contexte de la guerre d'indépendance en Algérie a créé une thématique nouvelle dans la littérature maghrébine de langue française. Les images de la guerre paraissent comme le support de cette thématique que nous essaierons d'analyser dans cet article, à travers l'étude d'un des plus édifiants romans de guerre, soit Les Enfants du nouveau monde. Assia Djebar dessine dans cette oeuvre un tableau saisissant de la vie quotidienne du peuple algérien durant la guerre, et les conséquences qu'elle a eues sur le destin des gens issus de différentes couches sociales. Son récit est apte à refléter la diversité des points de vue sur la guerre, par la multitude de personnages présentés. Cependant, l’importance que Djebar donne aux détails n’obéit pas à un souci d’objectivité, car ce roman n’est pas à identifier à un véritable document historique ;
sa représentation n’obéit pas non plus à une esthétique expressive ou à une forme gratuite de l’art de l’écrit; sa véritable portée consiste à avoir trouvé un cadre littéraire idéal pour l’évocation de la réalité de la guerre dans un de ses multiples visages. Conformément à la perspective sociocritique, adoptée, l’on s’attachera à percevoir l’idéologie qui découle de cette représentation poétique de la réalité guerrière.
Machine summary:
"Les Enfants du nouveau monde est un roman qui suscite un intérêt artistique particulier, car il a pu créer l’image d’une guerre/spectacle par une théâtralité, qui au-delà de son originalité, est une représentation de la guerre dans ses conséquences les plus immédiates sur la vie sociale dans le conditionnement qu’elle 2 Voir: Stora, Benjamin, Imaginaires de guerre, Algérie-Viêt Nam en France et aux États-Unis, Paris, La Découverte, 1997.
Mais cette conception philosophique ne semble pas être celle d’Assia Djebar, car il nous apparaît que sa notion de guerre/spectacle a surtout une dimension psychologique; elle est en effet la manifestation littéraire d’une profonde analyse de la psychologie de la guerre qui se concrétise dans ses plus infimes nuances : attente et angoisse, ou enthousiasme et espoir.
» (Djebar, 1962: 14) Le lecteur/spectateur imagine plutôt, intercepte les faits, et les observe à travers le comportement des femmes dans le déroulement de la guerre; si bien qu’au point de vue formel du roman, les femmes elles- mêmes s’offrent à leur tour au spectacle, puisqu’elles sont un miroir de la guerre qui a lieu sur la montagne, et à défaut de descriptions concrètes sur la guerre, le lecteur/spectateur saisit une image, qui n’est peut-être pas complète, mais qui lui donne quand même une idée générale de ce qui se passe sur la scène de la montagne, et cela uniquement par les paroles ou les gestes des femmes."